DEBARQUEMENT OMAHA : LE PORT ARTIFICIEL
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C'est Mountbatten qui a été chargé de solutionner tous les problèmes d'approvisionnement en hommes, matériel et armes et donc de construire des ports artificiels "Mulberries" (=muriers)
Historique
En 1942, le raid sur Dieppe met en évidence le fait qu’il serait pratiquement impossible, aux forces d’Overlord, de s’emparer d’un port intact dès les premières heures suivant le débarquement. Les plages prévues pour le débarquement n’offrant aucun port susceptible d’assurer le ravitaillement des forces alliées, à l’exception de ceux de Cherbourg et du havre, trop éloignés , Lord Mountbatten apporte cette réponse boutade: « Ce port, nous l’emporterons dans nos bagages ».
Le nom de la personne à l'origine de l'idée du port Mulberry est contesté : on trouve Hugh Iorys Hughes, ingénieur gallois qui aurait soumis les plans initiaux de l'idée au War Office britannique, mais aussi le professeur John Desmond Bernal et le vice-amiral John Hughes-Hallett. Churchill s'y intéressa et le concept des ports Mulberries commença à prendre forme lorsque Hughes-Hallett fut nommé chef de l'état-major naval de l'opération Overlord. Lors de la conférence Quadrant à Québec, en août 1943, le projet est présenté par le War Office. Les différents chefs alliés valident le projet.
En 1943, un essai de trois conceptions différentes de port artificiel fut lancé et testé en réel dans le Solway Firth en Écosse. Le choix final se fit lors d'une tempête au cours de laquelle le « Swiss Roll » fut emporté, les « Hippos » furent sapés par la mer, par contre les voies flottantes de Beckett ( nom de code Whale) ne subirent pas de dégâts. Elles furent donc retenues.
La solution britannique n'était pas le seule. L' Amiral John Leslie Hall, Jr., US Navy commandant de la force amphibie d'Omaha Beach, ne croyait pas qu'un port artificiel pourrait survivre aux actions de la mer. Lors d'une discussion avec l'amiral Cunningham, de la Royal Navy, Hall a déclaré:
I think it’s the biggest waste of manpower and equipment that I have ever seen. I can unload a thousand LSTs at a time over the open beaches. Why give me something that anybody who’s ever seen the sea act upon 150-ton concrete blocks at Casablanca knows the first storm will destroy? What’s the use of building them just to have them destroyed and litter up the beaches.”(Admiral John Leslie Hall, US Navy)
"Je pense que c'est le plus grand gaspillage de main-d'oeuvre et d'équipement que j'ai jamais vu. Je peux décharger un millier de LST à la fois sur les plages ouvertes ... La puissance de la mer avec ses tempêtes détruira 150 tonnes de blocs de béton. Quelle est l'utilité de les construire juste pour qu'elles soient détruites et encombrent les plages? "
Malgré les contraintes techniques, les retards et les multiples correctifs apportés aux éléments déjà construits ou en cours de fabrication, les Mulberries seront prêts pour le jour J.
Fin 1943, trois cent sociétés (plus de 40 000 personnes), se voient confier la construction de 212 caissons en béton armé (poids de 1672 à 6044 tonnes), des 23 plate-formes de déchargement articulées et de 15 kilomètres de chaussée flottante destinés aux Mulberries A et B de Saint Laurent-sur-Mer et d’Arromanches.
Le 4 juin 1944, par l’opération Corncob, les éléments des Mulberries sont mis à l’eau puis tractés par des remorqueurs jusqu’au milieu de la Manche.
Au soir du Jour J, les premiers Goosberries, faisant office de brise-lames, sont coulés face aux plages du débarquement. Arrivés en vue des côtes françaises au matin du 6 juin 1944, les premiers caissons Phoenix équipés de défenses anti aériennes sont positionnés puis immergés, à marée haute, aux premières heures du 7 juin 1944. La mise en place des block-ships et du Mulberry B est achevée dans la journée du 13 juin 1944.
Aspects techniques
Les chiffres montrent l'importance du projet: superficie de 500 ha, 6 km de jetées et digues , 60 navires sabordés (Blockships), 33 plates-formes Loebnitz. Un Mulberry complet nécessite 600 000 tonnes de béton avec 33 jetées et avait 15 km de routes flottantes pour acheminer hommes et matériel sur la terre ferme.
Les ports proposés étaient constitués de trois parties :
-
les jetées et digues artificielles, pour créer un plan d'eau abrité,
les quais de déchargement,
les voies flottantes, reliant les quais à la côte.
Les jetées
Elles
furent créées en associant les éléments suivants :
les blockships, navires condamnés et coulés sur place,
les bombardons, caissons métalliques en forme de croix,
les caissons Phoenix, énormes caissons en béton.
-Les blockships sont constitués de 56 vieux cargos, anciens navires de guerre qui traversent la Manche depuis le port de Poole, où ils avaient été rassemblés. Ils se positionner dès le 7 juin au niveau des cinq plages pour être coulés, la coque dépassant de deux mètres à marée haute.
-Les bombardons sont des caissons métalliques d'une dimension de 60 × 8 m. Remorqués à travers la Manche, ils sont reliés entre eux et font office de brise-lames au large des ports artificiels. Ces bombardons vont causer de nombreux dégâts lors de la tempête de mi-juin.
-Les caissons Phoenix étaient d'imposants caissons en béton, d'une forme parallélépipédique et cloisonnés à l'intérieur. Il fut conçu six modèles de caissons, du plus petit pesant 1 670 tonnes, au plus gros de plus de 6 000 tonnes avec une longueur de 70 m, une largeur de 15 m et une hauteur de 20 m. Sur place, ces caissons étaient remplis d'eau à l'aide de vannes que l'on ouvrait dans chacun des compartiments et reposant sur le fond de la mer, seule la partie haute émergeait des flots, formant ainsi des digues de protection et des jetées .
Les 212 caissons Phoenix (pour les deux ports) furent remorqués à travers la Manche jusqu'aux côtes normandes à la vitesse de 8 km/h.
Les quais
Les quais à l'abri des jetées devaient pouvoir suivre la marée, en montant et en descendant. Ces plates-formes de 70 par 20 m, pesant1 100 tonnes coulissaient sur quatre chandelles d'acier de 30 (les spuds), posées sur le fond marin. Des vérins hydrauliques permettaient un débattement de 5 m.
Les voies flottantes
Des voies flottantes, appelées whales (baleines) furent conçues pour relier les quais au littoral. Ce sont des passerelles métalliques d'une longueur de 24 m et d'une masse de 28 tonnes qui reposaient sur des flotteurs en béton de 19 tonnes chacun. Ainsi, des tronçons de près de 150 m de long, composés chacun de cinq passerelles, traversèrent la Manche pour être reliés entre eux devant le littoral normand. Un total de 15 km de jetées flottantes fut construit. Après la guerre, certaines de ces passerelles furent réutilisées pour remplacer des ponts détruits par les bombardements à l'intérieur des terres.
Début de la construction du port artificiel dés le 7 juin :
"Gooseberry 2 " digue de vieux navires coulés et de blockships "Corncobs" pour abriter de petis navires. Il y avait aussi un "Gooseberry 1" à Utah et des "Gooseberry 3, 4 et 5" en secteur britannique. D'où viennent ces navires ? 52 cargos (22 anglais, 16 américains et 14 divers) furent regroupés en Ecosse le 30 mai 44 et, accompagnés de remorqueurs, furent conduits à Poole où 3 navires supplémentaires les rejoignirent. Du 7 juin au 12 juin, ces 56 cargos "blockship", chargés de béton, furent coulés afin qu'à marée haute, la coque dépasse d'environ 2 mètres. A Omaha ce sont 14 navires qui furent coulés dont 4 libertyships endommagés:
"Mulberry A" véritable port artificiel (voir le plan)est constitué d'une rade protégée par:
-des caissons "Phoenix", ponton-caisson en béton, coulés, pour protéger le port (maximum de 65 m de L, 18 de l et 20 de H. 6000 T)
- es brise-lames flottants "Bombardons"de 60 m de long et 8 m de haut reliés pour former une longue barrière, sorte de radeau bouée flottante métallique et creux, en forme de croix. Cela protège de la houle et permet le mouillage en eau profonde des gros navires du mulberry.
- Des quais flottants autoélévateurs avec la marée("Lobnitz")
- des passerelles flottantes ("Whale")
- des chaussées "Causeways" permettent le débarquement (assemblage de caissons métalliques cubiques de 2 m qui permettaient un accostage facile des navires permettant des déchargements à sec).
Il y avait aussi un Mulberry B à Arromanches (qui ne fut que partiellement détruit par la tempête)
Le port est construit par la 128ème Task Force de l'US Navy à partir du 7 juin et sera quasi terminé le 16 juin. Le groupement Provisoire des Brigades Spéciales du Génie a préparé le travail (nettoyage de la plage, routes d'accès)puis a procédé au déchargement avec les fameux DUKWs (canards). Dès le 18 juin, Omaha devient le principal port européen avec plus de 8000 T par jour.
La tempête des 19-20-21 juin 944
Les ports étaient programmés pour entrer en fonction à J+21 c’est-à-dire le 27 juin et durer trois mois. Mais le 19 juin, une tempête se leva, qui allait durer trois jours, produisant des vents de force 6 à 7, soit 45 à 60 km/h avec des creux de deux à trois mètres.
Contrairement à ce qui est souvent écrit, ce n'était pas la « tempête du siècle » (les chiffres le confirment) mais une tempête comme en arrivent plusieurs fois par an dans notre région, avec un vent de « noret ». Ce vent toujours violent qui dure parfois une semaine prend source au Groenland et s'engouffre par la mer pour venir frapper les côtes du Bessin et du Cotentin.
Cette tempête provoqua des dégâts considérables sur Mulberry A, le port américain face à Omaha Beach et de moindre ampleur sur celui d'Arromanches. Si le matériel était le même, l'emplacement était différent et, montage et assemblage également...
Pourquoi ?
Officiellement les services américains lors de la préparation des opérations ont tenu compte essentiellement des vents dominants du sud-ouest et d'ouest ainsi que de sud-est (?). Pas de mention spéciale pour les vents de nord-est.
Sur le port américain, les caissons brise-lames avaient été coulés en eaux trop profondes et les blockships, ces vieux bateaux coulés en protection devant les caissons étaient trop espacés. Du coup, ils ne purent empêcher la houle de pénétrer dans le port et de ravager les quais et voies de débarquement.
Lorsque la construction des ports artificiels a commencé à partir du 8 juin à Omaha-Beach, les premiers pontons ont été posés pour lutter contre les vents d'ouest, la logique... alors qu'à Arromanches, les Anglais avaient commencé leur construction côté est, pour lutter contre les vents de noret.
En plus les blockships d'Omaha devaient être posés dans des eaux plus profondes qu'à Gold et sur un fond sableux alors que le secteur de Gold connaît un fond rocheux. D'autre part cette portion de plage était beaucoup plus exposée aux vents dominants du nord-est, ainsi qu'aux marées et aux courants plus forts que dans les secteurs Anglo-canadiens.
Les américains, pressés d'utiliser le plus rapidement possible leur port, avaient laissé des vides correspondant à la largeur d'au moins deux bateaux de commerce. Ces vides devaient servir de passe d'accès au port alors que, dans le plan initial, les blockships devaient être coulés les uns derrière les autres et au plus près du précédent. Pour une mer en furie, ce fut une aubaine et elle s'y engouffra emportant tout sur son passage. Ces passes ont permis au ressac de fouiller le sable sous les coques des navires coulés, ce qui a accentué leur enfoncement.
Aussi à Omaha la tempête s'est engouffrée dans le port et l'a disloqué, alors qu'à Arromanches, les premiers pontons, judicieusement posés à l'est, ont joué leur rôle et les installations n'ont été que partiellement détruites."
Les bombardons perforent phénix et navires, les brise-lames sont échoués, quais et passerelles sont inutilisables, la moitié des caissons phoenix détruits....près de 800 embarcations de tous types s'enchevêtrent sur la plage, mêlées à diverses épaves (jetées, navires...).27 phénix sur 35 sont détruits.
Vent de NE à .... noeuds | |
18 juin | 25 |
19 juin | 30 |
20 juin | 30 |
21 juin | 35 |
Conséquence
Il fut donc décidé d'arrêter la construction et d'abandonner le port américain, en tant que tel. Les éléments encore en état furent utilisés pour réparer et améliorer le port britannique, qui fut rebaptisé Port Winston. On estime que cette tempête a provoqué un déficit de 20 000 véhicules et 140 000 tonnes de ravitaillement.
Si seul le Mulberry B reste opérationnel après la tempête de mi-juin, les Américains vont faire preuve d'un grand sens de l'organisation et vont battre des records de déchargement de marchandises, de munitions, de véhicules et d'hommes sur les plages d'Utah et d'Omaha en utilisant une autre technique, beaucoup plus simple et surtout beaucoup plus efficace !
Aussi dès le 23 juin, le débarquement reprend en accès direct de LST sur la plage.
L'exploitation du port d'Omaha après la tempête
Un port détruit... mais toujours N°1 !
Alors que le port d'Omaha est donc presque terminé et qu'il fonctionne déjà avec plus de 8000 T par jour survient la terrible tempête des 19/22 juin 1944 qui va détruire le port : une centaine de LC sont perdus, presque tous les pontons sont détruits, la plage n'est qu'un amas de 800 embarcations enchevêtrées et mêlées à diverses épaves (jetées, navires...). 27 phénix sur 35 sont détruits. Très vite le problème du ravitaillement se pose puisque l'on ne possède que les 2/3 des réserves prévues, mais avec un grave manque de munitions d'artillerie.
Toutefois dès le 23 juin, le débarquement reprend en accès direct de LST sur la plage. Le génie avec 1500 hommes va procéder pendant une semaine au nettoyage. Des éléments du port (30%) seront récupérés et transportés vers Arromanches pour réparer son port, moins atteint. Ce sont les "Seabees" (Abeilles de mer), des unités du Génie de qui ont réparé port, pontons et péniches endommagées
Le port sera modifié : la digue est renforcée par 12 blockships supplémentaires (10 américains et 2 anglais seront coulés entre le 7 juilet et le 26 août, soit un total de 26 ) et 26 nouveaux Phoenix destinés à l'origine à la rade Mulberry abandonnée (8 en section A, 5 en section B et 13 en section C); pour le reste, ce qui sera récupérable sera transféré à Arromanches.
Le port continuera à être efficace, sans la structure prévue mais avec:
-les "causeways"(chaussées flottantes) décharger les navires
-un système de "pontons rhinoferry", flottants et se déplaçant, qui permettent le déchargement
-des centaines de s véhicules "flottant" (dukw ou canards, LCM, LCT...) Ces petites unités s'abritant en cas de vent derrière la digue renforcée. Il y a d'ailleurs eu peu de vent cet été.
L'expérience a finalement démontré l'efficacité de ces procédés et, profitant du beau temps, le trafic d'Omaha Beach a atteint et dépassé le trafic d'Arromanches, sans pourtant disposer de quais et jetée flottantes.
PLAN DU GOOSEBERRY D'OMAHA au 5 AOUT en italique les navires ajoutés après la tempête * sera renfloué |
1°
section OUEST |
|||
HMS
Centurion RU |
Courageaous US |
*Baialoide Panama |
JamesIredell US |
Kenttukian US |
Alcoa
Leader US |
Kofresi US |
Robin
Gray US |
2°
section |
||||
Galveston US |
Wilscox US |
Potter Panama |
Geo
W Childs US |
Artemus
ward US |
Lena
Likenbach US |
West
Nilus US |
Exford US |
Maycrest RU |
|
Stanwell RU |
Illinoian US |
3°
section EST |
|||
*Audacious Panama |
*Flight
Command Panama |
||
James
WMarshall US |
West
Grama US |
Olambala Panama |
Très vite les 7 km de la plage d'Omaha vont devenir le port le plus actif alors que les structures portuaires initiales sont détruites!
Ainsi fin juin :
Fin juin
44 |
Tonnes
par jour |
% prévisions |
OMAHA (plage) | 14.200 |
120 % |
UTAH (plage) | 7000 |
124 % |
ARROMANCHES (port) | 3600 |
80 % |
GOLD (plage) |
4500 |
|
JUNO (plage) |
5200 |
Omaha, chaque jour, en juillet et Aout, en moyenne, plus de 10.000 T sont transbordées, auxquelles s'ajoutent 10.000 hommes et 2000 véhicules.(A Utah ce sont 5500 T avec 7500 h et 800 véhicules)
Au total, les deux plages américaines ont réussi à débarquer en juin près de 300.000 T et plus de 450.000 Gi's, ce qui demeure en dessous des prévisions (360.000 T et 580.000 Gi's). Seront donc mis en complément d'activités tous les petits ports traditionnels de la côte : Isigny, Grandcamp, Carentan, St Vast qui permettront chacun de dépasser les 1000 T par jour. Cherbourg complètement dévasté sera devenu l'équivalent du port artificiel d'Omaha le 20 Août.
Tonnes/jour |
Eté 44 |
|
Omaha | 10.000 T | juin à septembre |
Utah | 5000 T | |
Arromanches | 6765 T | |
Cherbourg | 10.000 T fin Août |
20.000 T en Novembre |
Tonnage
du port d'Omaha |
||||
Juin
1944 |
année
1944 |
Au total, les deux plages américaines ont réussi à débarquer en juin près de 300.000 T et plus de 450.000 Gi's, ce qui demeure en dessous des prévisions (360.000 T et 580.000 Gi's). Seront donc mis en complément d'activités tous les petits ports traditionnels de la côte : Port en Bessin, Isigny et Grandcamp le 23 juin, Carentan et Barfleur le 25 juillet, St Vaast le 9 juillet qui permettront chacun de dépasser les 1000 T par jour. Cherbourg complètement dévasté sera devenu l'équivalent du port artificiel d'Omaha le 20 Août.
Le port s'arrêtera en fin d'année (19 novembre 1944) en raison du déplacement du front qui s'éloigne et avec la forte concurrence des ports de Cherbourg, du Havre, de Rouen puis d'Anvers.
Il a permis de débarquer 600.000 hommes, 100.000 véhicules et d'évacuer 43000 blessés et 24000 prisonniers.
Du rôle des ports artificiels
Souvent mis en avant comme ayant permis la réussite de la bataille de Normandie, le rôle des ports artificiels est désormais beaucoup relativisé par les historiens.
38 à 48% du tonnage britannique transita part le port d'Arromanches entre le 6 juin et le 31 août et beaucoup moins les premières semaines: 12% au 19 juin et 19,6% début juillet.
Les Américains, bien que privé de leur port et sans utiliser celui d'Arromanches débarquent 40% de tonnes de plus que leurs alliés anglos-canadiens (10 000 tonnes par jour contre 6 000).
Ce n'est qu'après-guerre que les Alliés estimèrent que d'un point de vue logistique, ils auraient pu se passer d'un port artificiel, surtout que le temps et l'argent dépensé pour sa construction aurait pu être mieux utilisé dans l'effort de guerre. Mais la présence d'une telle structure permettait aux Alliés de ne pas se focaliser immédiatement sur la prise d'un port dans les semaines suivant le débarquement, contrairement à ce ce que pensaient les Allemands.
Que devient le port d'Omaha ?
Ensuite Cherbourg prend le relais, puis Le Havre et Rouen en septembre, et Anvers le 28 novembre ; le port fermera officiellement le 22 novembre 1944 (le 30 novembre pour Utah)mais en réalité une activité réduite continuera quelques semaines encore avec des Dukws jusqu'en février 1945.
La plage et les falaises seront déminées par des équipes composées à 95 % de prisonniers allemands et à 5% de français, les morts seront nombreux car les explosifs vériés et bien cachés, que ce qsoit les mines terrestres, marines et lesobus non explosés. La plage demeure très encombrée par les vestiges du port,la ferraile et les épaves. Beaucoup de matériel sera récupéré et...revendu!
Quelques années après le débarquement, on vient en famille voir les vestiges, ce qui attire de nouveaux "touristes" et suscite bien des convoitises car il y a beaucoup de choses à récupérer, en particulier les métaux rares (cuivre, bronze, laiton) et des appareillages, en cette période difficile.
Le nettoyage du port et de la plage d'Omaha
Le port d'Omaha n'a pas été nettoyé immédiatement car les priorités sont données aux ports traditionnels qu'il est urgent de remettre en état. Cela va donner du travail : les entreprises de renflouement vont se développer , on en comptera 8 dans le Calvados dans les années 1950 dont une de plus de 10 ouvriers ; on verra aussi se développer les entreprises de récupération de métaux (35 dans le Calvados)
A Saint Laurent, s'installe d'abord la société Serma, et ensuite lui succède l'entreprise Van Loo ("13 canal de l'Ancre à Anvers") qui va rester une dizaine d'années. Le travail restant sera ensuite effectué par l'entreprise De Mota de Courseulles de 1950 à 1970 ; enfin, la concession sera reprise par l'entreprise Lemonchois de Commes (près de Port en Bessin)qui sera chargé de "ferrailler" ( démolir les épaves pour en récupérer la ferraille). Aujourd'hui, c'est toujours cette entreprise qui est chargée de continuer à ferrailler les vestiges que les marées continuent de mettre à l'air ! (visiter son musée des Epaves!)
Au total, il semble que 5 navires furent renfloués
Nom |
Année renflouage | Tonnage | pavillon |
Audacious (1913) |
1947 |
6861 |
Panama |
Flight Command (1911) |
1947 |
4341 |
Panama |
Baialoide (1914) |
1949 |
6479 |
Panama |
Exford (1919) échoué à Vierville |
1951 |
4969 |
US |
et que 144.00 tonnes de ferrailles furent extraites des blockships restant, auxquels s'ajoutent tous les autres débris métalliques, épaves, vestiges de ports qui furent extraits.
L'entreprise Van Loo, installée au Ruquet, dirigée par Monsieur Maille, occupa jusqu'à 200 ouvriers, dont beaucoup d'habitants locaux (Monsieur Mouillard était chef d'équipe, Monsieur Lemarquand conduisait le dukw, Monsieur E Scelles, A André ont aussi travaillé comme ouvriers. C'étaient souvent des italiens qui étaient plongeurs scaphandres). Ainsi une certaine activité agita Saint Laurent dans les années 50 : Madame Dozman monta, route de la mer, une baraque en bois qui devint un bar restaurant actif qui servait jusqu'à 80 couverts le midi. Les petits bals du samedi soir étaient animés avec de fréquentes bagarres ...L'on venait de loin pour voir toutes ces épaves et l'on hésitait pas à pique niquer puis à se baigner environné par la ferraille (il existe encore de nombreuses photos de famille en témoignant. Voir en complément l'Ouvrage "les sentinelles du silence cité dans la bibliographie). Les locaux n'ont pas hésité à faire de la "récup" sur les navires, tout ce qui pouvait être emporté le fut ! des roues de jeep, du métal , jusqu'aux baignoires. Ces épaves offraient aussi un autre avantage en permettant aux amateurs de pêche en mer de trouver là un endroit très intéressant pour pêcher... voire même pour y passer la nuit !
Ce ferraillage se réalisa de différentes manières:
-au sec : on renfloue l'épave en faisant souder par des scaphandriers des plaques de métal sur les trous puis on pompe l'eau et enfin on transporte par grande marée l'épave sur le sable.
-immergé : si le navire ne peut être déplacé, on coupe en morceaux les structures qui sont soulevées par grues (cas fréquent) et transportées par dukw
- par scaphandrier : qui travaille avec un guide pour découper au chalumeau la ferraille.
Les accidents furent nombreux, on dénombre 4 morts en septembre 1951 et de nombreux blessés.
Cette ferraille (au prix d'environ 900 F la tonne en en 1955)quittait ST Laurent par:
-Mer vers Caen (SMN)
-Camion vers Bayeux puis par train vers Caen (SMN)
-Camion pour les non ferreux, vers Isigny pour être réexpédiée vers la Belgique et la Hollande ex: 600 T partent en 1953, seulement 1760 T en 1957)
Les vestiges des pontons Phoenix en béton et des morceaux plus ou moins importants d'épaves demeurent sous la mer, ils sont à peine visibles de nos jours(par marée basse uniquement ou par plongée).
Aujourd'hui, on peut uniquement voir à Vierville accroché à une jetée, un dock "ponton flottant" qui était accroché aux plates-formes auto élévatrices "Lobnitz".
A proximité d'Omaha (voir la rubrique LOGISTIQUE)
Pour l'approvisionnement en pétrole (essence) Mountbatten propose la création d'un pipeline sous la Manche, c'est l'opération PLUTO (Pipe Line Under The Ocean) qui doit faire traverser la Manche par un PIPE LINE sous marin de l'ile de Wight à Cherbourg.
Mais l'on créa en plus un autre système qui fonctionna fin juin: des pétroliers approvisionneront deux dépots situés entre les deux secteurs américains et anglais, à Port en Bessin et à Ste Honorine des Pertes d'où partiront des pipe-line (de 6 inches) qui alimenteront en carburant les troupes au fur et à mesure de leur avancée. Ainsi des "sealine" sont installés avec un véritable "terminal pétrolier". Ce réseau alimentait des réservoirs construits sur le mont Cauvin, à Maisons , qui servait à la fois aux anglais et aux Américains. Ensuite il a été raccordé au pipeline de Cherbourg. Plus tard, Boulogne servira aussi de port pétrolier. Le tonnage total de carburant écoulé est de 175.000 tonnes avec p une pointe à 8000 T en une journée.