Témoins Normands

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JEAN Simone, âgée de 19 ans, vivant chez ses parents agriculteurs à La Folie

Dormir dans les tranchées

Hélas ! Les évènements de Juin 44 n’ont pas été que de bons souvenirs, avant l’arrivée des Américains les Allemands nous bombardaient, mon père avait même fait nos valises pour changer de pays car il avait très peur pour nous. Nous avions creusé des tranchées tout autour de la ferme où nous habitions car cela nous protégeait. Une nuit, nous avions du dormir par terre dans la cuisine, et une autre fois nous avions du dormir dans les tranchées, mon petit frère qui était encore jeune ne voulait pas dormir dans les tranchées et il pleurait, j’ai du donc aller dormir dans notre abri de jardin. Nos voisins étaient eux aussi venus se réfugier dans nos tranchées. Mais une fois les Américains arrivés, tout cela avait cessé.

Un parachutiste !

Mon premier américain, c’était le mois de Juin, c’était un après-midi vers 3 heures. A mes cotés il y avait mes parents et mes voisins les Formentins, il faisait beau, j’étais dans la cour de la ferme, au dessus de ma tête j’aperçois je ne sais combien de parachutistes, j’ai été très impressionnée, je suis vite rentrée dans la maison le dire à mes parents.
Quelques instants après, on aperçoit dans le jardin un parachutiste qui était accroché dans un arbre. Il nous faisait de grands signes avec les bras pour nous montrer que c’était un soldat Américain. On est allé à son secours. Il a fallu prévenir les secours, tout ce dont je me rappelle, c’est qu’il s’est rendu car il croyait que l’on était des Allemands mais nous l’avons tout de suite rassuré en lui disant que nous étions Français. Je ne me rappelle plus si il était blessé, nous l’avons rentré chez nous puis les secours sont arrivés. Il était assez jeune, je me rappelle qu’il avait quelques armes sur lui, il avait un uniforme militaire, ça a tellement été vite que je ne me souviens plus de son moral, ni de son physique. Nous nous nous sommes pas parlés mais il continuait à nous faire des gestes pour nous montrer que c’était bien un Américain.
Au moment de la rencontre, j’étais, malgré ma peur, très impressionnée et très rassurée car avec ses gestes nous étions rassurés de savoir que ce n’était pas un Allemand car il y en avait encore quelques uns

De grande tentes pour mettre les blessés

Pour remercier les américains, mon père leur avait prêté un champ juste en face de notre ferme pour installer leur infirmerie, ils avaient planté de grande tentes pour mettre les blessés, et, en échange, ils nous apportaient du chocolat, des chaussures, des vêtements et même du pain ou autre nourriture tous les matins. Après leur départ, nous avons trouvé des caisses de savon dans les champs ! Ils avaient beaucoup de ravitaillement. .Plus tard après leur départ nous étions très émus de les voir partir.

J’ai pu rencontrer d’autres soldats, c’était les infirmiers qui soignaient les blessés, nous avions de très bons contacts car, eux aussi, nous apportaient de la nourriture… et ils nous avaient donné l’autorisation d’aller visiter les infirmeries, ils étaient vraiment très gentils avec nous ! Une anecdote amusante c’est que c’est là que j’ai commencé à fumer, avec les Américains mais en cachette car il n’aurait pas fallu qu’il tombe dessus parce que sinon ! Il y avait la bonne mais maintenant c’est une employée de maison et moi qui allions chacune notre tour ramasser des pommes de terre pour allez fumer notre cigarette, et mon père ne s’en est jamais aperçu ! Ils ne nous ont pas laissé de souvenirs, ni offert de cadeaux, mais nous nous leur avons donné un champ et ils étaient très heureux.

Ce qu’on avait peur, c’était les noirs...

Des Américains, ce qu’on avait peur, c’était les noirs, alors là, eux, il fallait s’en méfier d’eux... Je me souviens un soir, j’étais à traire avec l’employée à l’étable et puis il est arrivé deux hommes noirs, mais les Américains eux vraiment étaient corrects comme les Allemands d’ailleurs, alors là, on n’en avait pas peur des Allemands ! Ils étaient très corrects, on pouvait les rencontrer sur la route, moi je me vois encore être toute seule: jamais, jamais. Je me vois aussi allez cueillir de l’herbe sur la route, jamais un Américain ou un Allemand n’était pas correct, et puis il n'aurait pas fallu car ils auraient étaient sévèrement punis. Ah oui hein, mais à part ça... c’est les noirs ! Ils forçaient les femmes à faire l’amour, et même, j’ai connu une dame qui était mariée et qu’était à traire aussi et un noir l’a forcée et elle a eu un enfant noir parce qu’elle a pas pu s’en débarrasser ; Ca c’est sûr qu’on les appréhendait les noirs !

DATE DE L’INTERVIEW : 14 Novembre 2003
LIEU : Bernesq
DUREE : 30 min
RECUEILLI PAR : Camille Zevaco et Maëva Hardelay